Un jour pas si éloigné, avant qu’elle ne bascule radicalement dans son monde,

j’ai pu prendre, léger, ma douce maman vraiment dans les bras. Longtemps.

Elle m’a dit, un clin d’oeil dans la voix:

« Ah, c’est comme cela que l'on fait alors!? »

 

En la serrant encore plus fort, je lui ai affirmé: « Mamy, je t’aime » 

Elle m’a répondu: « La même chose ! » 

 

C’est donc l’histoire de petites choses de la vie.  De pudeurs. D’ici et d’ailleurs. De mondes intérieurs. De chemins cherchés. D’étapes. De parcours croisés. De surprises. De rencontres. Rien d’extraordinaire. Et pourtant...

 

De ce qui lui restait de mémoire et de langage, j’ai noté pendant 5 ans et demi ses dernières phrases compréhensibles. Vous trouverez dans l’exposition, celles, universelles, qui croisaient ma vie et mes photographies « japonaises ».

 

Parfois, l’espace d’un instant ou d’une seconde, son monde rejoignait le nôtre.

C’était à chaque fois un cadeau.

 

Ainsi il y a trois ans, alors que l’on était ensemble depuis plus de deux heures,

elle m’a demandé:

 - « Manu est venu me voir? »

Je lui ai répondu:

- Oui ! Il est venu et il va très bien ! (Elle s’inquiétait toujours pour nous)

  Et tu sais qu’il s'est marié avec sa compagne japonaise ? (J'aimais le lui répéter)

 

- « C’est vrai !!!? Et ça tient ? »

- « Oui et il est très heureux ! »

 

Elle a alors ajouté, sans intervalle,

avec des larmes aux yeux et un immense sourire instantanés:

- « C’est magnifique ! »

 

Et moi, d’essayer de poursuivre :

- « Et tu sais qu’il va avoir un enfant ? C’est aussi incroyable ! »

 

Elle, de conclure:

- « Tout arrive ! » puis..., « Il y a encore de beaux jours ».